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 [ESSAI] Le régime politique de Bretagne

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Myrlin de Chateaubriand
Le Maîstre des lieux
Camarade breton
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   Posté le 11-08-2006 à 19:45:04   Voir le profil de Myrlin de Chateaubriand (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à Myrlin de Chateaubriand   

Essai sur le régime politique de Bretagne


L’étranger en Bretagne égaré, sans se douter du trépas annoncé, aurait de quoi se demander, si la hache du bourreau ne vient pas à tomber, quelle est donc la nature du système politique de ce pays éclairé. Lorsque le peuple tout entier acclame une Reine, il serait suicidaire de crier vive le roi, tandis que périodiquement se tiennent des élections, divers collèges de sages se maintiennent et assurent un contrôle étroit de la gestion publique, parallèlement le duc dit souverain se prosterne devant une Grande Duchesse, n’étant autre que ladite Reine, tout en se dressant d’égal à égal avec le monarque de France. Voilà mixture d’institutions propre à dérouter l’esprit arriéré de l’étranger. Pourtant cette complexité n’est autre que le reflet de l’élaboration raisonnée et laborieuse d’un régime politique conciliant deux exigences que l’on prétend s’exclure mutuellement : la puissance et l’équilibre. Il peut paraître inconcevable pour les étrangers attardés d’atteindre à la fois l’autorité et la représentativité. Dans l’imaginaire collectif la concentration du pouvoir entraîne la réalisation d’une véritable puissance publique, au détriment du respect de la collectivité, qui fatalement finit par contester, rendant impossible un équilibre durable des différentes composantes de la société dans la fresque politique. Or la Bretagne, j’en suis convaincu, a réussi ce tour de force, approchant ainsi le point culminant de l’aboutissement du système politique collectif, autrement nommé par les penseurs antiques : l’État.

Unique en notre temps, le régime breton l’est, dans l’histoire, ce n’est plus le cas, car il fut une autre organisation politique qui adopta le même schéma de conception : la République romaine, qui succomba sous le poids des arrivismes et ne convenait plus à la dimension de l’empire. Ainsi il est à penser que le modèle breton n’aurait pas de raison de succomber si le pays parvient à se prémunir des arrivistes pouvant représenter le visage de l’individualisme avec la soif de réunir les pouvoirs dans sa main, faciès que l’on connaît au roi français lorsqu’il lorgne de trop vers l’Ouest, ou bien le visage de l’idéalisme lorsqu’il est question de dissoudre les pouvoirs en prétendant les confier au peuple, car s’il s’agit là d’une fort belle idée que la démocratie égalitaire et ouverte, ce n’est pas avec une belle idée que l’on répond aux impératifs d’un Grand-duché tels que la stabilité, la capacité à agir vite mais bien, la sagesse de faire le bon choix et la force de le faire appliquer. Ces nécessités, ni un prince tout puissant ni des assemblées démocratiques ne peuvent y répondre, en cela qu’ils feront ou trop ou trop peu face à chacune et que le monopole du pouvoir, que ce soit par une personne ou par un corps de la société, tels les nobles ou même le peuple en son entier, ne peut mener qu’à des abus, des erreurs. D’où l’impérieuse obligation de répartir, avec raison, les différentes tâches de la politique, entre divers protagonistes au fonctionnement et à la pensée différente, pour obtenir ce qui fit la grandeur de Rome jadis : un régime mixte.

La paternité de la notion de régime mixte revient aux groupes de penseurs antiques, de Denys d’Halicarnasse à Cicéron en passant par celui qui en fit la plus sérieuse description : le grec Polybe. Rome mêlait monarchisme avec deux consuls tout puissants, aristocratisme avec un Sénat veillant à tout et démocratie avec des comices ou assemblées. Nulle institution ne pouvant fonctionner sans les autres, ce qui obligea le premier empereur : Octave, à obtenir son pouvoir absolu de la volonté du Sénat et des comices et non à le prendre de force.
Transcendant ce modèle, la Bretagne connut au travers de son histoire une période de monarchisme avec les rois Nominoë et Konan, une période aristocratique durant l’ère féodale et une période démocratique avec les grands bouleversements intervenus depuis la fin de la guerre de cent ans, avec Iziledur, premier Duc de Bretagne élu. Forte de ces expériences, la Bretagne a su, avec une remarquable intelligence, concilier les différents aspects de son passé, pour composer un modèle nouveau propice à assurer son avenir. En assemblant les diverses composantes qui sont les fondations de la Bretagne, le duché est parvenu à une synthèse particulièrement moderne puisque donnant lieu à ce qu’il est possible d’appeler aujourd’hui l’État breton, que nous allons expliquer et décrire présentement.

Le régime breton est monarchique en cela qu’un exécutif bicéphale domine l’ensemble des institutions, sans pour autant les commander. La Grande-duchesse, la très sainte et luminescente Nathan la blanche, communément appelé reine en hommage aux traditions ancestrales de ce pays, règne sur tous pour toujours. Elle est immuable et intouchable : elle est princeps, c’est à dire la première de tous. En cela nul ne peut la destituer, nul ne peut l’attaquer. Souveraine à vie, tirant son rang de la Constitution même et non du suffrage, elle tire son pouvoir de Dieu, de la terre bretonne et des hommes. C’est pour cela que les hommes seuls ne peuvent revendiquer de disposer de son pouvoir. Son princeps lui confère une immunité totale en justice, car parfaite, car incarnant la Bretagne, elle est elle même la loi. C’est de cette philosophie que découle son auctoritas, cette capacité juridique à élever tous les actes de droit. De par sa supériorité s’explique aussi sa capacité à destituer le duc en place si celui ci venait à commettre une ou des fautes mettant la Bretagne en péril. Enfin sa voix surpasse toutes les autres et sa dignité suprême lui confère une vaste autorité morale que nul ne peut contrer.
L’autre tête du monarchisme breton est le duc, n’ayant à se prosterner que devant la Grande-duchesse et Dieu, le duc est le véritable gouvernant de la Bretagne. Il est le chef de l’administration, il commande aux fonctions de l’État breton à l’exception de la justice indépendante. Maître de la destiné du pays, il dispose d’une immunité juridique forte, d’un pouvoir réglementaire général, d’une autorité sur chaque bourgmestre, sur chaque breton et personne circulant en Bretagne, il dispose de par la loi d’un droit de vie ou de mort sur chaque individu, il dirige l’armée, la diplomatie, fixe tous les axes politiques de Bretagne et ne reçoit d’ordre de personne.
Face à ces deux figures imposantes, n’importe qui est en droit de croire que la Bretagne est en monarchie, et pourtant ….


Le Grand-duché breton dispose d’un aspect aristocratique certain, non pas au sens de la noblesse, mais plutôt de la sagesse. Deux organes non élus se partagent une part importante de la puissance publique : la Cour des hermines, essentiellement composées de nobles et la Cour de justice, composée des meilleurs juristes bretons nommés par la première Cour. La Cour des hermines étant le parlement de la noblesse et donc des plus dignes de Bretagne, possède la capacité d’évaluer la dignité de tous. Ainsi elle est seule à décider si une personne peut être anoblie ou non, elle peut conférer, retirer ou refuser la citoyenneté bretonne, elle dispose d’une auctroritas restreinte, peut proposer des lois et à son mot à dire pour les affaires courantes. Les hérauts sont notamment sous son autorité. Quant à la Cour de Justice, elle est le principal contre-pouvoir en Bretagne, en raison de son statut de juridiction suprême. Apte à dire et interpréter souverainement le droit, elle est l’autorité suprême de la justice, gardienne des textes. Mais sa compétence la plus importante, bien que la moins utilisée fort heureusement, est de bloquer, réviser et retirer tout acte juridique qu’elle estimera non conforme à la norme supérieure. Même les décisions politiques, si elles s’avèrent contraires à une règle de droit, peuvent être brisées par cette Cour. Comble de sa puissance, son existence est garantie par la Constitution, seule une réforme constitutionnelle pourrait donc mettre fin à son autorité, or elle est compétente pour invalider toute réforme constitutionnelle qui serait contraire à l’esprit constituant et contraire avec les grands principes du droit. Ainsi il est légalement impossible de diminuer son influence sans son approbation. Son auctoritas restreinte et arbitraire donnant lieu à un embryon de pouvoir législatif.
Alors que le statut juridique de chacun et l’ensemble du droit est sous le contrôle de deux collèges non élus, il n’est pas excessif de considérer la Bretagne en aristocratie.

Cependant, il semble indéniable que la source même du pouvoir réside dans le peuple. Si celui ci n’est guère institutionnalisé et peut paraître démuni juridiquement, il n’en demeure pas moins le véritable maître de la politique en Bretagne. Car les principaux titres de noblesse s’obtiennent après avoir tenu une charge publique, alors que ces charges publiques sont déterminées par le conseil en place, alors que la composition de ce conseil appartient à la volonté populaire, que les personnes ayant été élues auront toujours à rendre compte de leur travail devant le peuple, il n’est pas faux de dire que les dirigeants sont sous le contrôle et l’autorité informelle du peuple. Par ailleurs, le droit en lui même, bien qu’érigeant la toute puissance du Duché et lui offrant de nombreux moyens pour diriger le pays, a également pour vocation majeure voire principale de servir la collectivité bretonne et surtout de protéger les Bretons, tant contre les autres bretons que contre les étrangers mais aussi et peut être surtout contre les éventuels excès de l’administration. Or nulle institution n’est au-dessus du droit, nul ne peut y déroger, de cette manière, le peuple peut être envisagé comme maître de la Bretagne et l’administration à son service. Les suffrages réguliers, les élections ouvertes à tous les citoyens, la libre expression publique et la capacité à agir en justice en réponse à tout trouble, dommage, abus dont on aurait été victime, assurent au peuple son pouvoir à choisir le chemin à suivre. Cette vue de l’esprit nous amènerait donc sans que l’on soit totalement dans l’erreur à l’affirmation que la Bretagne est une démocratie.

A la fois monarchique, aristocratique et démocratique, la Bretagne renoue avec le savant mélange institutionnel romain pour assurer une gestion des affaires publiques efficace et équilibrée. Efficace car celui qui crée le droit est également celui qui agit, le législateur et l’exécutif se fondent en une seule et même institution : le conseil, organe fort sous la gouverne du duc, apte à prendre des mesures radicales rapidement. Efficace aussi car le pouvoir est subtilement réparti au mieux des compétences. Le contrôle du droit appartient à un collège de juristes totalement indépendant des contingences politiques, l’attribution de la dignité appartient aux nobles dont le rang est indépendant des conjectures politique et les affaires courantes sont aux mains d’un conseil qui est la politique. Le peuple dans sa sagesse observe et juge à intervalle régulier, rendant par les urnes sa sentence sur le travail accompli. L’équilibre est ainsi atteint puisque les différents corps politiques possèdent un rôle fort et intouchable, l’un ne peut chasser l’autre, l’un ne peut agir impunément grâce au regard de l’autre et si le conseil peut agir seul, il ne doit jamais oublier que sans l’approbation des sages et du peuple, il le paiera à la Cour de Justice et aux prochaines élections.
A cela s’ajoute qu’en cas de conflits entre les institutions, la Grande-duchesse dispose à tout moment de la possibilité de révoquer le conseil, de faire taire les sages et de composer sans le peuple, pour sortir la Bretagne d’un éventuel blocage politique et lui permettre de poursuivre son chemin vers la gloire et la prospérité.

Message édité le 11-08-2006 à 20:56:50 par Myrlin de Chateaubriand
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